Il n’y a pas qu’à la DETE, qu’on avait des idées pour essayer d’améliorer les prestations fournies aux utilisateurs.
Lorsque je suis sorti des apprentis à Oullins-Machines, j’ai été affecté au SVEE
(Service de Vérification et Essais Electriques), dont la mission de base était la réparation et la remise
en état de tous les appareils électriques et électronique qui équipaient alors les engins qui venaient
en RG ou GRG. Cela allait de la remise en état et étalonnage des appareils de mesure des locomotives
(voltmètres, ampèremètres, compteurs d’énergie, etc.) jusqu’aux amplificateurs de sono des rames automotrices,
en passant par les relais de toute sorte, etc.
Donc, il s’est posé un problème : comment vérifier l’état des sections des induits des moteurs de traction,
sans être obligé de les sortir de l’induit ?
Pour vérifier un court-circuit à la masse, ou une coupure, c’est simple. Un coup d’ohmètre, ou de mégohmètre,
et le tour est joué. Mais pour vérifier un éventuel court-circuit entre spires, c’est moins simple.
Une ou plusieurs sections de bobinage de l’induit présentant des court-circuits entre spires provoque des irrégularités
dans le fonctionnement du moteur qui ne sont pas visible, si ce n’est la perte de rendement dudit moteur, plus échauffement anormal.
Très difficile à cerner.
Une solution consiste à stimuler l’inductance par une impulsion rapide, et voir l’oscillation amortie générée.
Une pointe de haute tension (1000V, quelques microsecondes) permet aussi de vérifier la qualité de l’isolation.
Mais à l’époque (1965), la solution pour générer une telle impulsion n’était pas évidente.
L’utilité des différentes revues techniques que l’on recevait apparaît ici.
Un de mes chefs de service était tombé sur un article décrivant les possibilités de nouveaux dispositifs,
les thyratrons à hydrogène. Après moults cogitations, il apparu que ces tubes pourraient résoudre notre
problème. Une réalisation vue donc le jour et l’application à l’atelier du bobinage résolu le délicate
question du test des sections et évitait ainsi bien problèmes sur les moteurs de traction.
A l’époque les trains lourds qui circulaient en Savoie, avec les UM des grosses 1ABBA1, 1CC1 et 2CC2, une machine devant, une
au milieu, et une en queue posait le gros problème de la synchronisation des commandes par les trois conducteurs. La transmission
des informations à coups de sifflet était quelque peu inefficaces.
L’idée fut donc de transmettre aux deux machines intermédiaires, au moins l’état du couplage des moteurs, ce qui
donnait déjà une bonne indication aux conducteurs. Trois voyants, disposés dans les cabines indiquaient l’état
du couplage de la machine de tête.
Pour transmettre cette information, il n’y avait pas de câblots entre les machines, et les transmissions par émetteurs HF
posaient vraiment trop de problèmes. L’idée fût d’utiliser la caténaire 1500V pour véhiculer l’information.
Trois générateurs BF de fréquences différentes (entre 15kHz et 20kHz) suffisaient. La réalisation de
l’électronique fût relativement simple, une poignée de transistors, quelques bobines, et voilà. Maintenant,
il fallait transmettre ce signal à la caténaire, et là, beaucoup moins simple, surtout à la réception,
un quantité non négligeable de parasites à basse fréquence et niveau élevé venaient perturber le jeu.
Un transfo à tôles classiques transmet aussi bien le signal à 15kHz de faible niveau que les parasites à
fréquences industrielles et de niveau très élevé.
Parmi nous, il y avait des gens qui s’intéressaient aux techniques de télévision (NB à l’époque),
et au fil des discussions j’eu l’idée d’utiliser les ferrites qui équipaient les transfos THT des téléviseurs,
et qui ont la faculté de ne transmettre que les fréquences élevées. Le lendemain de cette discussion,
un collègue qui faisait aussi du dépannage TV ramena une poignée de ces ferrites issues de vieux transfos HS,
et nous pûmes alors faire l’essai, qui fût concluant et permis la réalisation de ce dispositif.
Enfin, un autre problème qui nous fût soumis concernait les triages, et la réduction des chocs que subissent
les wagons quand ils sont lancés de la butte du triage. La longueur de la rame en formation étant toujours variable,
et il ne peut pas y avoir un gars qui cours à coté du ou des wagons lancés, pour les saboter au bon moment.
Il fût imaginé un engin par le bureau d’étude des ateliers d’Oullins-Machine, que l’on appela
" le lapin ". On comprendra plus loin pourquoi cette appellation.
J’ai eu à m’occuper de la télécommande de l’engin, qui me valut un déplacement à Villeneuve-St-Georges.
Entre les voies du faisceau du triage, une autre voie de petit gabarit avait été posée. Un chariot bas circulait sur cette voie interne,
entre les roues des wagons. A une distance définie de la rame en formation, la télécommande faisait rabattre
sur la voie, devant les roues du wagon lancé, deux tiges supportant des sabots. Un chariot avec deux grandes oreilles mobiles,
d’où le surnom " le lapin ". Ce sabotage permettait le ralentissement, puis, dégagement du lapin
par accélération, repli des " oreilles ", et retour pour le suivant.
Ce dispositif, vraiment très compliqué à manipuler n’eut pas de suite (à ma connaissance).
Succès ou échecs, c’était l’époque, hélas révolue, où la SNCF tirait vers le haut
la technique ferroviaire.
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