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Avant le tube cathodique



Les images en couleur sur un écran de télévision sont devenues tellement habituelles, que l’on ne s’étonne même plus de leur existence. La science et les technologies nous ont tellement habitué à des prodiges journaliers, que nous en sommes blasés. Et pourtant, tous ces faits si banals actuellement sont le fruits d’efforts et d’ingéniosité de nos ancêtres.
Mais revenons au sujet qui nous intéresse plus particulièrement : la télévision.

Lorsqu’en 1876, Mr Graham Bell réussi à convertir du son en courant électrique , puis du courant électrique en son, on appela cela le téléphone, bien des chercheurs ce sont dit que si le son a pu être transmis à distance, pourquoi pas l’image.
Mais, le son est une variation de pression en fonction du temps. Trouver un capteur qui traduise la variation de pression en variation de courant électrique, ne fût qu’une question de technologie.
Mais une image ? Qu’est-ce qu’une image ? Un ensemble de combinaisons lumineuses colorées, dans un espace à trois dimensions, dans lequel le temps n’a strictement rien à faire.
Comment traduire cela en signal électrique pour pouvoir le transmettre ?
La première solution consista à convertir l’espace à 3 dimensions en un espace à 2 dimensions, puis de transformer les nuances colorées en échelles de gris.
Mr Nicéphore NIEPCE y arriva fort bien avec son système de photographie.
L’image restait malgré tout un espace à deux dimensions.
La première idée astucieuse qui fit avancer la question fût proposée par Mr Carey, un américain, qui décomposa l’image en une succession de carrés. 50 cases horizontales sur 50 cases verticales, soit 2500 cellules. La cellule photoélectrique étant née entre temps, Mr Carey proposa de réaliser un écran de 2500 cellules photoélectriques, reliées par 2500 fils, à 2500 ampoules disposées comme les cellules photo, sur l ‘écran de réception.
Cette idée, pratiquement irréalisable eut quand même le mérite de suggérer le découpage de l’image.
Mais la notion de temps restait absente, les 2500 signaux étant transmis simultanément par 2500 fils.
C’est un Français, Mr Senlecq, qui en 1881 eut l’idée de séquentialiser l’analyse de l’image, en reprenant l’idée du découpage de l’image en cellule, et considérant que chaque ensemble horizontal de cellule représente une ligne d'image, dont chaque point est analysé successivement, puis on passe à la ligne suivante.
Ce fût l’introduction de la notion de temps dans l’analyse de l’image. Etape décisive. L’image n’est plus un ensemble complexe en deux dimensions, mais une succession d’échantillons, comme le son.
Reste plus qu’à faire cette analyse point après points.
Si on met une cellule photoélectrique en face d’une image, on n’obtiendra qu’une valeur moyenne de la luminosité de cette image.
A l’époque, il n’y avait pas encore de systèmes électronique de balayage d’image. On a donc fait appel à des systèmes mécaniques. C’est là qu’un jeune étudiant allemand,  Mr Paul Nipkow, intervient.
Il eut l’idée de capter la luminosité de chaque point de l’image, en déplaçant un trou sur cette image, de droite à gauche, puis on recommence, en décalant un peu vers le bas.
Pour réaliser ces déplacements, il pensa utiliser un disque percé selon une spirale qui fait le tour du disque. Chaque trou est séparé en horizontal de la largeur de l’image, le nombre de trous dépendant du nombres de lignes que l’on souhaite pour analyser l’image. Le décalage vertical entre le premier trou et le dernier est la hauteur de l’image.
Le dessin ci-dessous représente le dispositif schématisé. Le disque est en matériaux plein, Chaque cercle blanc est un trou, la cellule est disposée derrière le disque, et l'image à analyser est projetée sur le disque (le petit chat).
Quand donc, l’image est projetée sur ce disque, au temps 0, le premier trou se trouve en haut et à gauche de l’image. Le disque se met en rotation.
Ce premier trou parcours la largeur de l’image, selon un ligne, courbe. La lumière passant à travers ce trou est récupérée par un cellule photo, qui traduit l’intensité lumineuse en courant électrique.
Pendant la rotation, cette cellule traduit donc les états lumineux des points de l’image se trouvant sur la trajectoire du trou. Lorsque ce dernier quitte l’image par la droite, le second trou aborde l’image, à gauche, et légèrement en dessous du point de départ du premier trou. Ce second transmet à la cellule photo, les variations lumineuses des points de la ligne en dessous de la première. Et ainsi de suite, jusqu'au dernier trou, qui est décalé verticalement d’un peu moins que la hauteur de l’image, et qui transmet les variations lumineuses des points du bas de l’image.

Quand ce dernier trou quitte le bord droit de l’image, le premier se présente à nouveau à sa position d’origine, et le cycle recommence. On analyse ainsi toute l’image, point après point.
La cellule photoélectrique transmet un signal électrique, variable dans le temps, représentant l’intensité lumineuse de chaque point de l’image d’origine. C'est ce qui est appelé maintenant un signal vidéo analogique.
A la réception, on installe un disque identique, qui tourne en synchronisme avec le disque émetteur.
Un dispositif lumineux, de surface identique à la surface de l’image, dont l’intensité lumineuse est modulée par le signal reçu de la cellule est disposé derrière le disque récepteur.
Quand celui-ci tourne, l’observateur placé devant le disque voit la lumière du dispositif lumineux, à travers les trous qui se déplacent, et crée le même balayage qu’à l’émission. La luminosité variant selon la position du trou, en fonction de ce qui est vu par la cellule émettrice, l’observateur aperçoit l’image reconstituée, à travers les trous.

Nipkow déposa un brevet en 1884, mais son idée ne pût être réalisée que 40 ans plus tard, par un écossais, Lord Baird, qui réussi à faire une démonstration avec un disque de 16 trous, Pendant l’exposition Radio de 1928, à Berlin , Mr Nipkow, qui avait complètement oublié son brevet, se retrouva fort surpris, en présence d’un prototype de transmission télévisée, utilisant les disques portant son nom, et démontrant le fonctionnement correct du système.
La photographie ci-contre est celle du tube néon, fabriqué par Philips, qui était chargé de reproduire la lumière modulée à la récéption.

La note d'origine de ce tube, éditée par Philips est ici.

En 1929, Berlin commençait des émissions d’images selon ce principe.
En France, plusieurs ingénieurs se sont attelés au problème.
Les premiers essais eurent lieu à Montrouge en 1928 avec l'ensemble émetteur-récepteur à 30 lignes d’un Monsieur, dont le nom est resté célèbre dans l'histoire de la télévision Française, Mr René Barthélémy, puis la première image en 1929.
Nombre d’améliorations furent apportées, par exemple l’entrelacement des lignes, qui évite un effet de vague lumineuse de haut en bas, durant la restitution de l’image.
L’entrelacement consiste à diviser l’image en lignes paires et impaires, puis à diffuser d’abord les lignes impaires, puis les lignes paires, qui viennent s’intercaler entre les précédentes. On divise ainsi par deux, le temps d’affichage de l’image. Mr Brillouin remplace les trous par des lentilles, améliorant considérablement le rendement lumineux du système. Les premières émission débutent en France en 1932, par l’émetteur de Paris-PTT, sous l’impulsion et la maîtrise du même René Barthélémy Voici donc, les premiers constituant de la télévision mis en place. Plus tard, Mr Zworykin mis au point le premier tube électronique de prise de vue, l’iconoscope.
Entre temps, le tube cathodique a été perfectionné, et l’ensemble des deux a définitivement éliminé tout système mécanique de la télévision. (On aura plus tard à nouveau des problèmes avec la mécanique, les claviers qui coincent, les rotacteurs qui se bloquent, etc..)
Voilà par exemple, le schéma (128Ko) d’un récepteur de télévision, datant de 1932, mettant en œuvre le disque de Nipkow, et le tube lumineux 3500. Ces documents m’ont été généreusement donné par Mr Guy PASQUET, qui a conservé jusqu’à nos jours ces documents précieux pour la mémoire de ces techniques : la télévision, la vidéo, analogique, puis numérique.

Pour l'anecdote, voici les prix des tubes de l'époque, en francs 1932...


Documentation :
Cours fondamental de télévision. Lauret et Carrasco
Revue de l'UER : 50 ans de télévision.
Editoriaux de Mr E. Aisberg (revue Télévision)
Documents Philips

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